Quatrième de couverture
Les fêtes païennes se succèdent au rythme lent de la roue de l’année. Les rites se suivent, de l’éclosion de la Nature à la saison sombre, en passant par la maturité et l’abondance – puis la venue de ce miracle sans cesse répété : le renouveau. Aujourd’hui encore, ces agapes nous parlent des ravages des tempêtes et des frimas, de la peur de la Nuit, de l’émerveillement face à la Vie, de la passion charnelle qui réchauffent les âmes aussi bien que les corps.
Dans ces Saisons païennes, huit auteur vous invitent à découvrir autant de célébrations, ainsi que les couleurs, les émotions et les enseignements qui les définissent. Chacune de leurs histoires, illustrées avec poésie et tendresse par Serafina, joue des symboles et de l’atmosphère appartenant à la fête qui l’a inspirée.
Liens familiaux et liens d’amour, mais aussi quête d’identité et soif d’acceptation par soi-même comme par les siens sont autant de questions qui se font écho d’un récit à l’autre. L’individu se transforme dans une alchimie sauvage et naturelle qui se réalise depuis l’enfance de l’humanité. Il évolue et se « dépasse », pourrait-on dire. Mais il n’est pas tant question d’aller au-delà de soi que de chercher sa vérité en son âme et son esprit.
La Roue des Saisons résonne, au final, comme un voyage vers soi-même.
Mon avis
La vision du cycle des saisons par les Celtes, les anciens, m’attire depuis pas mal de temps. J’ai noté un ouvrage indispensable en la matière – Vivre la tradition celtique au fil des saisons de Mara Freeman (en suivant le lien, vous tomberez sur l’avis d’Anne sur Fées Divers), sur lequel je n’ai toujours pas réussi à mettre la main, si bien que je pense que je vais le récupérer en anglais – mais je demeure quelque peu néophyte, concernant le sujet.
Aussi, vu cet intérêt de base, quand j’ai vu que les éditions du Chat Noir lançait une anthologie sur les saisons païennes, je n’ai pas hésité. À la lecture de cet ouvrage, le troisième proposé par le collectif d’auteurs Les Enfants de Walpurgis, j’ai d’ailleurs regretté l’absence de préface ou de glossaire qui aurait éclairé sur les différentes fêtes celtes (ou même wiccanes, l’influence de la Wicca se ressentant dans plusieurs textes – ce qui n’est pas une critique en soi puisque la Wicca cherche à retrouver les cultes anciens, cycles saisonniers compris). Les néophytes en seront donc quittes pour des recherches s’ils veulent en savoir plus sur les fêtes citées ou creuser davantage la proximité (ou non) des nouvelles avec les symboliques de ces fêtes.
Je précise cependant que cette absence d’infos ne gêne en rien le plaisir de la lecture, simplement, je suis certaine que, vu le sujet de l’antho, quelques précisions auraient été judicieuses. Par ailleurs, chaque texte est introduit par une jolie illustration en noir et blanc de Serafina – des illustrations plutôt mignonnes, qui n’ont pas de lien avec les nouvelles mais qui apportent une autre vision des fêtes dépeintes.
Mais venons-en aux nouvelles ! Qu’elles soient proches ou non de la symbolique des fêtes qui leur sont attribuées, toutes en sont tout de même inspirées. Même de loin. En avant pour un avis texte par texte ! 🙂
Samain : Les danses de Samain de Céline Guillaume : une jeune femme, considérée comme une sorcière par les habitants, recueille un jeune noble blessé. Elle en tombe amoureuse mais elle est une paria alors que lui doit hériter des terres de son père… J’ai déjà lu une ou deux nouvelles de Céline Guillaume et je dois avouer avoir du mal avec sa plume. Non pas qu’elle soit mauvaise, mais simplement elle ne me fait pas vibrer. C’est la même chose pour ce texte, qui pourtant aurait pu m’accrocher s’il n’avait pas été aussi bref. L’évolution des sentiments du personnage principal, à un moment donné, a pâti de cette brièveté, la rendant pas très cohérente ou pas assez profonde.
Yule : Noces sanguines au coeur des ténèbres de Marianne Stern : dans une petite ville de Scandinavie, les habitants célèbrent Yule d’une manière peu chrétienne mais empreinte des joyeuses traditions païennes. Un jeune homme amer va cependant croiser la route de partisans d’un culte sanglant… Marianne Stern, qui a aussi sévi sous le nom de Marianne Gellon, nous invite à une histoire placée dans un contexte moderne, même si l’on n’est pas très sûr de cela au départ. Elle nous mène par le bout du nez une grande partie de l’intrigue, et non seulement j’ai marché, mais en plus j’ai bien aimé ! Pas vraiment de surnaturel dans ce texte, mais une nouvelle plaisante par le fait qu’on se fait complètement avoir. Une vision de Yule très moderne, peut-être pas respectueuse des déités réelles en jeu, mais réjouissante en tous les cas.
Imbolc : L’étincelle en moi de Vanessa Terral : ce texte-là je l’attendais au tournant ! Pas pour le démolir ou parce que je m’attendais au pire, bien au contraire ! 🙂 Pour avoir déjà lu (et grandement aimé) la plume de Vanessa Terral au fil d’anthologies, j’étais impatiente de découvrir sa vision d’Imbolc. Et pas de déception ! Comme à l’accoutumée, Vanessa Terral fait preuve d’un style prenant, efficace autant que soigné, et d’une appropriation de la tradition réelle. On sent qu’elle s’est documentée sur le sujet. Quant à la nouvelle, elle conte l’histoire d’Helena, mi-femme mi-ange, perdue parmi les mortels, entre ses deux natures… Une nouvelle poignante autant que prenante, imprégnée de la symbolique d’Imbolc, qui prend place dans l’univers développé dans le roman du même auteur, L’Aube de la guerrière. Si vous ne l’avez pas lu, pas de souci, c’est mon cas aussi et cela n’a gêné en rien ma lecture. Par contre, alors que j’avais déjà envie de le lire, cette excellente nouvelle (l’une de mes favorites de l’antho) a renforcé mon envie ! 🙂
Ostara : Éclosion de Angélique Ferreira : une jeune femme malade se désespère de partir sans avoir enfanté… voilà un texte qui aurait pu être davantage plus émouvant (le sujet s’y prêtait) si je n’avais pas été tannée durant toute ma lecture sur la crédibilité des événements. Renseignements pris, c’est possible. Rarissime, mais possible. Et puis, la magie prête souvent au miracle ! L’autre souci qui a fait que je ne suis pas rentrée dans le texte, c’est l’emploi incorrect (à mon sens) d’un mot de vocabulaire, et très récurrent tout au long de l’histoire. Du coup, cette nouvelle ne m’a pas laissé un souvenir impérissable mais je pense qu’elle parlera plus aux personnes touchées de près par le sujet et qui savent mettre en off leur oeil de bêta-lecteur ! ^^
Beltane : Pour que l’histoire s’achève de Stéphane Soutoul : issue d’une famille qui a toujours honoré Bélénos, une jeune femme coupe tous les ponts, se refusant à suivre cette voie. Les années passent et à mesure que son couple bat de l’aile du fait de son infertilité, un hiver sans fin s’installe… Stéphane Soutoul nous livre un texte qui évolue de l’amertume à la colère, de la passivité à l’action, de l’obscurité à la lumière. Un texte très très chaud – les feux de Beltane y sont ceux de la chair – lecteurs prudes, passez votre chemin ! Je n’ai pas vraiment été touchée par cette nouvelle .
Litha : Solstice fatal de Bettina Nordet : Liane aspire à obtenir des pouvoirs magiques. Pour ce faire, elle recherche le rituel ultime qui la rendra puissante… un texte empli de la noirceur de la protagoniste et de l’innocence de celle qu’elle veut sacrifier. Une histoire en forme de leçon sur les affamés de pouvoir, assez plaisante ma foi, en tout cas menée par une plume qui sait dépeindre l’action efficacement.
Lughnasad : Ce qui nous lie de Cécile Guillot : une jeune femme s’apprête à célébrer ses noces selon les rites wiccans. Voilà un texte qui est aussi bref que marquant. Ce n’est pas tant l’histoire qui marque (elle est trop courte pour cela) que les émotions qui en émanent. La nouvelle de Cécile Guillot est pleine de tendresse, de sérénité, d’amour même. Une histoire lumineuse, donc, et cela fait d’elle ma seconde favorite de l’antho, tant la sensation de paix perdure après la lecture. À noter qu’ici aussi, le texte prend place dans le même univers que la série Fille d’Hécate du même auteur. Mais là aussi, je ne l’ai pas (encore) lu et cela ne dérange en rien la lecture de cette lumineuse nouvelle.
Mabon : L’offrande de l’été d’Ambre Dubois : la cour de Lumière s’apprête à transmettre le pouvoir à la cour d’Ombre, au terme de six mois de dur labeur. Mais la bague, objet transmettant les pouvoirs, a été dérobée ! Un désastre se profile… troisième favorite, cette nouvelle ! Bien écrite, prenante de bout en bout, située dans un univers original mais inspiré du folklore, voilà une nouvelle qui montre, une fois de plus, les dégâts que peuvent provoquer les hommes lorsqu’ils cherchent à contrôler ce qui ne doit pas l’être – à savoir, le cycle des saisons. Une belle leçon de respect des cycles de la nature, à notre époque moderne où qui veut du soleil tout le temps, qui de la pluie, sans songer que l’alternance des saisons est cela même qui permet à la Vie de perdurer.
Au final, une anthologie qui, si elle n’est pas exceptionnelle, voire même inégale, offre un bon moment de lecture et comporte quelques pépites.
Éditions du Chat Noir, 2012, 174 pages.
Merci beaucoup pour cette si belle chronique sur ma nouvelle!
J’ai été heureuse de tomber sur Imbolc car, si dans un premier temps, la fête n’est pas très facile à identifier, elle repose sur une ambiance à la fois d’un bleu glacé et d’un feu puissant tenu secret. Un superbe mélange qui convient totalement à mon approche esthétique des nouvelles!
Tout comme Yule, le sabbat d’Imbolc est fragile. En revanche, il ne « transporte » pas autant, on trouve moins cet élan de masse, cette grande liesse générale. Cette fragilité, c’est à chacun de veiller sur la sienne: son petit secret à soi, son enfant délicat, sa braise sur laquelle souffler.
(Sinon, moi aussi, j’ai hâte que tu lises « L’Aube »! ^__^ )