Quatrième de couverture
« Que nous est-il arrivé ?
Je ne sens plus l’odeur de la mer. Le temps se fige. La nuit me caresse d’angoisse, et je me pétrifie d’effroi à l’idée de la voir dans le noir…
Le village de Pic de Sel est maudit ; le mal de la Corbelle s’insinue dans mes veines, tapi entre mes os. Il me ronge comme il les a rongés… »
Mon avis
Attirée par le style artistique de Marion B. comme par la promesse d’histoires du genre littéraire fantastique, je me suis laissée tenter par son roman graphique, Pic de Sel.
A travers plusieurs récits, Marion B. nous peint, par petites touches, la ville maudite de Pic de Sel. Une ville hantée par les fantômes, les esprits et autres créatures évanescentes mais aux sombres desseins… à moins que les plus dangereuses créatures ne soient autres que les désirs obsessionnels de ses habitants.
Car des êtres surnaturels qui hantent les lieux ou des habitants très humains, la frontière entre les monstres est floue. Il y a cette sculptrice, amoureuse de son oeuvre au point de dérober le bien-aimé d’une autre pour lui permettre de prendre vie ; ce maire obsédé par l’or ; ce père violent… mais il y a aussi la Mort qui rôde ; un étang qui, non content de noyer ses victimes, en efface jusqu’au souvenir chez ceux qui leur survivent ; une sirène qui dévie un gardien de phare de son devoir…
Par fragments se dessine ainsi la cartographie de Pic de Sel comme de ses habitants, les récits s’entrecroisent, et aboutissent au journal intime du fossoyeur, point focal de toutes ces histoires, lui qui a enterré tous ceux que l’on a vu périr, au fil des pages. Lui qui ne peut pas non plus fuir ce qui hante le village. Sa malédiction.
Les récits m’ont rappelé les nouvelles fantastiques du XIXe siècle, en plus concis. Marion B. esquisse ses personnages, qui ne sont parfois même pas nommés. Elle s’attache surtout à créer une ambiance, une atmosphère à la fois sombre et mélancolique, et s’y réussit !
Le texte est sublimé par ses illustrations en noir et blanc, à la fois douces et tristes, reflets de ces histoires qui racontent, par petites touches, le destin cruel des habitants de Pic de Sel.
Un roman graphique à l’image de sa couverture, tout en nuances de noir et blanc, de frissons et de mélancolie.
Éditions Noir d’Absinthe, 98 pages, 2020
Cette lecture s’inscrit dans le cadre du challenge Printemps de l’imaginaire francophone, menu Rêvasser, catégorie Fantasmagories.
J’ai failli récemment craquer mais j’ai fini par intégrer ce beau livre à ma wish list d’anniversaire. Dans tous les cas, l’ambiance a l’air particulièrement travaillée…
Oui, on est vraiment dans une ambiance fantastique, très mélancolique et morbide à la fois, mais en douceur, comme les illustrations. Le texte et l’image se complètent fort bien, d’ailleurs !